Déclaration faite le 28 mai 2009 par la sénatrice Claudette Tardif
L'honorable Claudette Tardif (leader adjoint de l'opposition) :
Honorables sénateurs, je prends la parole une fois de plus en cette Chambre pour défendre une cause qui m'est chère : la dualité linguistique de notre pays et le respect de la Loi sur les langues officielles.
Quarante ans ont passé depuis son adoption. Quarante ans que John Ralston Saul qualifie de succès, avec un bémol. Je le cite :
C'est comme si il faut tous les jours se lever pour parler du fait que le [bilinguisme] marche, [...] que c'est important et que c'est normal, et qu'il faut aller beaucoup plus loin. Il faut aller beaucoup, beaucoup plus loin, et à un certain moment, ce n'est pas qu'on devient fatigué, mais on trouve cela fatiguant [parce qu'il] faut toujours refaire ces arguments, autant en français qu'en anglais.
Quarante ans de bilinguisme timide et de maigres récoltes. Comme le soulignait le commissaire aux langues officielles, le mardi 26 mai 2009, lors de la publication de son rapport annuel, « L'arbre a été planté, mais seulement quelques fruits sont murs. »
Honorables sénateurs, pourquoi faut-il encore, 40 ans après l'adoption de la Loi sur les langues officielles, justifier l'importance et le caractère essentiel des droits linguistiques et des programmes d'appui à ces droits et aux communautés linguistiques?
Une attitude résistante au bilinguisme subsiste. Selon John Ralston Saul, il est décevant de voir que le Canada n'a pas encore normalisé le bilinguisme. Il qualifie même ce refus de rendre normal le bilinguisme de « maladie canadienne ».
Tant que le bilinguisme ne sera pas normalisé, les francophones en situation minoritaire, les anglophones en situation minoritaire, tous les Canadiens arrivant à nos frontières, voyageant dans nos aéroports, gares et ports, tout Canadien étudiant dans les écoles primaires, secondaires et postsecondaires, tous les Canadiens ayant recours aux tribunaux, bref, tous les Canadiens devront chaque fois se battre pour que leur droit à être servis, éduqués ou jugés dans la langue officielle de leur choix soit respecté.
Le rapport du commissaire fait état de graves lacunes en matière d'offre active de services, de manque d'encadrement et d'affaiblissement de la gouvernance des langues officielles par ce gouvernement. Le bilinguisme reflète non seulement le caractère fondamental de notre dualité linguistique, mais aussi une richesse inestimable pour notre société. Il constitue également un premier pas vers le multilinguisme, un atout précieux au XXIe siècle, pour faire face aux défis d'un monde compétitif. Dans ce monde multilingue, la Loi sur les langues officielles place le Canada dans une position avantageuse et à l'avant-garde des défis d'intégration culturelle et linguistique, mais encore faut-il l'appliquer pleinement et non de manière minimaliste. Il est grand temps de cultiver le respect de nos droits linguistiques afin que l'arbre puisse enfin grandir sans entraves, s'épanouir et porter de nombreuses récoltes.