Publié par la sénatrice Claudette Tardif le 30 décembre 2008
L’annonce récente de nominations de sénateurs à la Chambre Haute par le Premier Ministre Stephen Harper a fait sortir le Sénat de l’ombre ces derniers jours.
Je tiens tout d’abord à mentionner que je suis contente de voir que le Premier Ministre reconnaît enfin son devoir constitutionnel de nommer des représentants à la Chambre Haute. À l’exception de la nomination controversée de Sénateur Fortier, ancien membre du Cabinet non élu, ministre des Travaux Publics puis du Commerce International, et du Sénateur Bert Brown de l’Alberta, M. Harper s’était abstenu de son devoir constitutionnel de pourvoir la Chambre Haute de représentants des minorités canadiennes, depuis son arrivée au pouvoir en 2006.
Je suis ravie d’accueillir au sein de la Chambre Haute de nouveaux collègues et espère pouvoir travailler de manière non-partisane avec eux prochainement. L’apport des sénateurs au gouvernement, à l’élaboration des projets de loi et à la démocratie canadienne est incommensurable. J’espère que ces nominations accéléreront la formation de comités du Sénat et que nous pourrons bientôt recommencer à travailler, afin de terminer les études entamées par les comités et poursuivre nos travaux législatifs.
Toutefois, j’aimerais souligner mon inquiétude quant au choix d’annoncer ces nominations pendant une période de crise économique et de prorogation, alors que le Parlement ne siège pas.
Le fait que le Premier Ministre parle de réforme pendant la campagne et se soit empressé de nommer des sénateurs en catimini, avant la période des fêtes, témoigne une fois de plus de son incapacité à tenir ses promesses. Un tel coup politique s’inscrit dans la série de promesses brisées, de tenir des élections à date fixe, brisée par l’appel aux élections le 7 septembre 2008, de collaborer avec les partis de l’Opposition, brisée par sa demande de prorogation le 4 décembre 2008, d’avoir un budget à déficit zéro, brisée par l’annonce de la nécessité d’un déficit en décembre 2008. Nommer ainsi des sénateurs en période de prorogation après avoir mener une campagne électorale prônant la réforme du Sénat est tout à fait conforme à sa politique de promesses vides.
La rumeur court que les projets de loi sur la réforme du Sénat, notamment sur l’élection des sénateurs, ont été arrêtés par des sénateurs libéraux. Cela est loin de la réalité. Le projet de loi C-20, proposant l’élection des Sénateurs, introduit par Peter Van Loan en novembre 2007, n’est jamais même arrivé au Sénat. Il est tombé lorsque les élections ont été déclenchées alors qu’il était étudié par le Comité législatif de la Chambre des Communes en juin 2008.
M. Harper craint peut-être que la réforme sénatoriale ne passe pas en raison de la présence d’une Opposition au Sénat en forte majorité. Or, pour devenir lois, les projets de loi de réforme sénatoriale doivent passer bien plus d’étapes que trois lectures à la Chambre des Communes et trois lectures au Sénat. Ils touchent à la Constitution du Canada et en tant que tel, des consultations avec chaque province sont nécessaires. La réforme du Sénat ne sera donc pas seulement votée par le Parlement, mais résultera d’une consultation avec toutes les provinces. Des nominations de sénateurs conservateurs ne changeront rien à cela.
Toutefois, des nominations partisanes pourraient changer la direction idéologique et politique du Parlement. Il est donc nécessaire que ces nominations soient faites en respectant les critères d’excellence des candidats et de représentativité des minorités et des régions, et non par souci de promotion des idéaux conservateurs du gouvernement.
L'honorable Claudette Tardif, Ph.D.,
Leader adjointe de l'Opposition au Sénat
Sénatrice de l'Alberta