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Motion tendant à constituer un comité spécial sur le secteur de la bienfaisance

Motion tendant à constituer un comité spécial sur le secteur de la bienfaisance

Motion tendant à constituer un comité spécial sur le secteur de la bienfaisance

Motion tendant à constituer un comité spécial sur le secteur de la bienfaisance


Publié le 1 juin 2017
Hansard et déclarations par l’hon. Terry Mercer

L’honorable Terry M. Mercer :

Honorables sénateurs, c’est pour moi un honneur de prendre la parole aujourd’hui au sujet de cette motion tendant à créer un comité spécial pour se pencher sur la situation des organismes de bienfaisance, des organismes à but non lucratif et des bénévoles qui les appuient.

Comme j’ai été un spécialiste du financement pendant la majeure partie de ma vie, j’ai vu passer de bonnes et de moins bonnes réformes des politiques gouvernementales, mais j’ai toujours vu et je vois encore des bénévoles formidables.

Comme j’ai souvent parlé dans cette enceinte des organismes de bienfaisance, des organismes à but non lucratif et de l’importance des bénévoles, ce que je vais dire n’aura rien de nouveau pour certains d’entre vous. Cependant, j’espère que mon intervention vous aidera à comprendre l’importance de ce secteur pour le Canada, et qu’elle saura vous convaincre d’appuyer cette motion et cette étude.

Le secteur philanthropique occupe une place très importante dans ma vie. Qu’ils travaillent en coulisse ou aux premières lignes, tous les intervenants du secteur forment un ensemble si vaste et si diversifié que je crois qu’il est temps que nous nous penchions sur les politiques qui encadrent le travail des organismes de bienfaisance et des organismes à but non lucratif, et sur ce que nous pouvons faire pour attirer plus de bénévoles et pour appuyer les bénévoles actuels.

Je voudrais faire état du travail accompli par les sénateurs Eggleton et Tardif dans le cadre de l’initiative Caucus ouvert du Forum des sénateurs libéraux. Nous avons, en effet, eu une réunion très intéressante sur le secteur caritatif en février dernier.

Comme je réfléchissais depuis un certain temps déjà à l’idée d’un comité spécial, j’ai décidé qu’il était temps de déposer une motion au Sénat. J’espère que vous voudrez appuyer cette initiative.

Je crois que nous devrions aborder cette étude en examinant l’influence qu’exercent les bénévoles dans notre grand pays, en analysant les politiques et les lois qui régissent le fonctionnement des organismes à but non lucratif et des sociétés de bienfaisance et en explorant des idées novatrices pouvant entraîner des changements là où ils sont nécessaires.

Les sociétés de bénévole et les organismes à but non lucratif ne peuvent pas exister sans bénévoles. Pouvez-vous concevoir un service de livraison de repas à des aînés ou l’organisation d’une campagne politique en l’absence de bénévoles?

Imaginez en même temps un volontaire qui se présente pour faire des appels liés au traitement de personnes atteintes de cancer ou pour trier des conserves dans une banque alimentaire et qui trouve des locaux fermés parce que son organisme n’avait pas de quoi payer l’électricité.

Les bénévoles sont évidemment le pilier des sociétés de bienfaisance et des organismes à but non lucratif partout au Canada et dans le monde. En fait, le secteur philanthropique compte sur plus de 2 milliards d’heures de bénévolat, ce qui représente l’équivalent de plus d’un million d’emplois à plein temps au Canada. Comme vous avez déjà eu connaissance de ces statistiques, vous comprenez sans doute pourquoi il est important de les répéter.

Le secteur philanthropique emploie plus de 2 millions de Canadiens et a une influence sensible sur notre économie. Il représente plus de 6 p. 100 de notre PIB. Il y a cependant une tendance à la baisse dans le nombre de personnes qui offrent bénévolement leur temps et leur argent afin d’aider des organismes qui défendent une bonne cause.

D’après l’Enquête sociale générale : dons, bénévolat et participation, 2013 de Statistique Canada, 12,7 millions de Canadiens, représentant 44 p. 100 des personnes âgées de 15 ans et plus, ont participé à une forme ou une autre de travail bénévole. C’est une baisse par rapport au sommet de 47 p. 100 enregistré en 2010, qui avait suivi de légères augmentations entre 2004 et 2010.

Le nombre total de bénévoles a baissé en 2013 par rapport à 2010, s’étant élevé respectivement à 12,7 et 13,2 millions. Autrement dit, il y a eu une diminution de 4 p. 100 du nombre total de bénévoles au Canada. Toutefois, la population des personnes âgées de 15 ans et plus a augmenté d’environ 1 million pendant la même période.

La contribution des bénévoles s’est élevée en moyenne à 154 heures en 2013. Le nombre était le même en 2010, mais il était en baisse par rapport aux 168 heures enregistrées en 2004.

Pourquoi cette baisse? Les chiffres continueront-ils à diminuer? Personnellement, j’aimerais bien le savoir.

Le rapport du Comité sénatorial spécial sur le vieillissement, paru en 2009, recommandait qu’une autre étude soit entreprise par un comité spécial afin d’examiner l’impact du secteur bénévole au Canada. Le Forum des sénateurs libéraux a récemment organisé un caucus ouvert sur les sociétés de bienfaisance, au cours duquel la même idée a été reprise.

Le secteur philanthropique canadien a besoin d’un examen complet. Nous devons mieux comprendre le secteur et encourager davantage de gens à lui offrir du temps et de l’argent. Nous devons poser les bonnes questions afin de déterminer si le secteur doit continuer à fournir aux familles et à nos collectivités des services dont elles ont grandement besoin.

Honorables sénateurs, vous auriez sans doute de la difficulté à trouver une seule personne au Canada qui n’ait pas été touchée, d’une façon ou d’une autre, par une société de bienfaisance ou un organisme à but non lucratif.

La principale mesure législative qui régit ces organismes est la fameuse Loi de l’impôt sur le revenu. Cette loi prévoit les modalités d’enregistrement des organismes de bienfaisance, processus qui permet à ces organismes d’échapper à l’impôt sur le revenu et aux donateurs d’obtenir des crédits d’impôt ou des allégements du même ordre.

Les dispositions de base de la Loi de l’impôt sur le revenu relatives aux organismes de bienfaisance remontent aux années 1960. Dans les premiers temps du régime, quelque 35 000 organismes de bienfaisance ont été enregistrés. Aujourd’hui, nous avons au Canada plus de 170 000 sociétés de bienfaisance et organismes à but non lucratif, dont 85 000 sont des organismes enregistrés reconnus par l’Agence du revenu du Canada.

Aucune étude approfondie n’a été réalisée pour déterminer si les lois et les politiques régissant ces organismes sont adéquates.

Les organismes de bienfaisance et les organismes à but non lucratif offrent des services et des programmes là où d’autres — et particulièrement le gouvernement — n’en offrent pas.

Aujourd’hui, les organismes de bienfaisance cherchent de nouveaux moyens de financer leurs activités et les services qu’ils offrent aux Canadiens. Il ne s’agit pas seulement de crédits d’impôt et d’autres allégements fiscaux. Il s’agit de tout un secteur, allant des bénévoles aux chefs de direction. Je crois très honnêtement que nous avons besoin de ce comité spécial, et que nous en avons besoin maintenant.

Honorables sénateurs, je me suis posé les questions suivantes en réfléchissant à ce que nous pouvions faire dans ce genre d’étude. Posez-vous les mêmes questions. La liste est longue, mais vous noterez que les questions sont toutes très importantes.

Comment pouvons-nous moderniser les secteurs des organismes à but non lucratif et des sociétés de bienfaisance au Canada? Pourquoi avons-nous besoin de bénévoles et de dons? Qu’est-ce qui amène une personne à faire don de son temps ou de son argent? Quelle influence l’âge a-t-il sur le bénévolat et la bienfaisance? Quelle influence la situation socioéconomique ou la géographie ont-elles sur le bénévolat et la bienfaisance? Quelle influence ont le sexe, la culture et la langue? Que pouvons-nous faire pour encourager davantage le bénévolat et la bienfaisance et quelles formes d’encouragements sont efficaces? Dans quels domaines avons-nous besoin de plus de bénévoles et de dons? Quels facteurs empêchent les gens de faire don de leur temps ou de leur argent? Dans quelle mesure les crédits d’impôt actuels sont-ils efficaces? De quelle façon faudrait-il les actualiser? Quelle est l’influence de la Loi de l’impôt sur le revenu sur les sociétés de bienfaisance, les organismes à but non lucratif et les bénévoles? Quelles idées a-t-on essayées dans le passé? Qu’est-ce qui continue à bien fonctionner? Qu’est-ce qui ne fonctionne pas?

Quand on examine la gouvernance du secteur philanthropique, dans quelle mesure les politiques mises en œuvre sont-elles efficaces? Le processus est-il transparent? Les gens font-ils confiance aux sociétés de bienfaisance? Dans quelle mesure le comportement des organismes à but non lucratif est-il conforme à l’éthique? Les bénévoles reçoivent-ils une formation suffisante pour respecter les règlements? Comment les sociétés de bienfaisance font-elles pour recueillir de l’argent et encourager le bénévolat? De quelle façon cela a-t-il changé à l’ère numérique? Quel est l’effet de la taille de l’organisme de bienfaisance sur ses efforts de collecte et sur la participation des bénévoles? Comment les organismes de bienfaisance sont-ils réglementés? Y a-t-il des obstacles à leur succès au niveau provincial, au niveau fédéral ou aux deux? Comment les ministères et organismes gouvernementaux réagissent-ils aux organismes de bienfaisance?

On pourrait en parler encore longtemps car, vous l’avez compris, bien des questions demeurent sans réponse et seront certainement posées au cours de cette étude.

Il y a un autre point à aborder, cependant, et c’est la question de savoir qui seront nos interlocuteurs? Il conviendrait bien sûr de dialoguer avec les représentants des gouvernements fédéral et provinciaux. Il faudrait aussi avoir l’avis des organisations à but non lucratif et des organismes de bienfaisance qui s’occupent d’une large gamme de services dans divers domaines : la santé, l’environnement, les hôpitaux, l’aide et le développement internationaux, les sciences, les services sociaux, les arts, les services récréatifs et le sport et, bien sûr, la politique.

D’autres organisations représentent des organismes à but non lucratif et de bienfaisance, dont l’Association of Fundraising Professionals Foundation for Philanthropy du Canada, Imagine Canada, la fondation Muttart, tous les bureaux de Centraide et bien d’autres.

Honorables sénateurs, j’ai gardé les meilleurs témoins pour la fin, je veux parler des bénévoles. Des organismes tels que Bénévoles Canada appuient les personnes qui font du bénévolat dans leur travail et apporteraient une contribution inestimable aux travaux du comité spécial.

Quant au comité lui-même, je reconnais qu’il est très occupé et que le temps réservé aux audiences est limité à certains jours et à certaines heures. C’est la raison pour laquelle j’ai proposé qu’il soit composé d’un maximum de huit sénateurs qui représenteraient les différentes régions du pays et les trois groupes qui siègent au Sénat, et qui serait idéalement composé d’un nombre égal de femmes et d’hommes.

Si le cadre de l’étude est prêt — il le sera peut-être cet automne —, nous pourrions avoir un an devant nous et rendre compte de nos travaux d’ici la fin septembre 2018. J’espère que tout cela sera approuvé avant la fin des travaux en juin. Nous aurions alors l’été pour faire certaines choses et pour que le comité amorce ses travaux, ne serait-ce que par téléconférence.

Cela représente-t-il assez de temps pour réaliser une telle étude? Il faudra peut-être demander plus de temps vers la fin, mais cela reste à déterminer.

Il est aussi important de mentionner quand les réunions auront lieu. Pour beaucoup de nos nouveaux collègues, ce sera l’un des premiers comités spéciaux depuis leur arrivée. Certaines réunions auront probablement lieu les jeudis soirs, comme il n’y a habituellement pas de séances du comité à ce moment, ou les vendredis matins, ou peut-être même les lundis soirs. Je n’aime pas lorsque les réunions ont lieu le lundi soir, car il est alors difficile pour certaines personnes, particulièrement celles qui viennent de l’Ouest du Canada, d’être ici à temps, mais nous trouverions une solution. Les réunions auront sans doute lieu durant différentes semaines de relâche, et nous ne ferions pas des semaines complètes.

J’essaie d’être bien honnête avec nos nouveaux collègues afin de leur montrer ce à quoi s’engagent les personnes qui deviennent membres du comité — la sénatrice Cordy et moi siégions au Comité spécial sur le vieillissement, et nous avons dû nous engager à libérer du temps pour cela.

Bien que ce ne soit pas idéal pour certains, nous devons penser à l’importance du travail de ce comité pour les bénévoles et les organismes qui jouent un rôle essentiel dans le tissu de la société canadienne.

Honorables sénateurs, j’espère que cela a donné matière à réflexion et que vous appuierez la motion avec enthousiasme. Le bénévolat fait partie intégrante de la culture canadienne. Notre société ne fonctionnerait pas aussi bien sans l’existence des secteurs des organismes sans but lucratif et de bienfaisance.

Prendre le temps de comprendre qui fait du bénévolat et pour qui travaillent les bénévoles nous permettra de mieux comprendre les dossiers qui tiennent à cœur aux Canadiens. En comprenant comment les organisations à but non lucratif et les organismes de bienfaisance fonctionnent à l’intérieur du cadre actuel, nous comprendrons mieux comment mettre les politiques à jour pour aider ces organismes à fournir aux Canadiens des services absolument indispensables.

J’aimerais mentionner une dernière chose, honorables sénateurs. Nous avons tous eu l’occasion d’interagir avec des bénévoles, des dizaines de milliers de bénévoles partout au pays, soit avec des partis politiques, soit pour des causes qui nous tiennent à cœur. Il ne faut pas oublier que ce sont des bénévoles et nous devrions les remercier de leur participation le plus possible. Nous continuons tous aussi, je l’espère, à faire du bénévolat pour les causes qui nous sont chères.

Les gens donnent de leur temps et de leur argent et les organismes sans but lucratif ou caritatifs fournissent des services d’une valeur inestimable pour nos collectivités. Essayons de voir ce que nous pouvons faire pour les aider.