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L’alphabétisation

L’alphabétisation

L’alphabétisation

L’honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, je suis heureuse de prendre la parole aujourd’hui au sujet de l’interpellation de notre ancienne collègue, la sénatrice Elizabeth Hubley, qui attire notre attention sur la situation de l’alphabétisation et des programmes d’alphabétisation dans sa province, l’Île-du-Prince-Édouard, et sur la nécessité pour le gouvernement fédéral d’appuyer ces programmes. Mon intervention d’aujourd’hui sera axée sur la situation de l’alphabétisation dans ma province, la Nouvelle-Écosse.

On ne saurait trop insister sur l’importance d’appuyer les groupes qui travaillent fort pour aider les Néo-Écossais qui ont de la difficulté à acquérir des compétences en lecture, en écriture et en calcul. L’acquisition de compétences solides en lecture et en écriture est essentielle au maintien d’une main-d’œuvre compétente et, qui plus est, elle permet aux Canadiens de briser le cycle de la pauvreté et de participer pleinement à la vie au sein de leur collectivité et même de leur famille.

En tant qu’ancienne enseignante au primaire, je suis parfaitement consciente de l’importance des compétences en lecture, en écriture et en calcul. Au cours de ma carrière de 30 ans dans l’enseignement en Nouvelle-Écosse, j’ai constaté de moi-même les difficultés auxquelles se butent certains élèves. C’est à l’école primaire que les élèves commencent à jeter les bases sur lesquelles reposera leur parcours d’apprentissage.

Hier, j’ai eu la chance de rencontrer des représentants de la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants. Notre discussion a porté principalement sur les défis auxquels les systèmes scolaires doivent faire face, ainsi que sur les effets que peuvent avoir la pauvreté et un mauvais état de santé mentale sur l’apprentissage, ce qui peut nuire à l’acquisition de compétences en lecture et en écriture. Les signes avant-coureurs et les signaux d’alarme peuvent être évidents même chez des élèves très jeunes. Il peut s’agir de troubles d’apprentissage ou de problèmes d’ordre comportemental ou familial. Il se peut aussi qu’un enfant n’ait pas eu assez à manger, qu’il manque de sommeil ou qu’il ait besoin de lunettes. Très souvent, les enseignants arrivent à détecter rapidement ces signes avant-coureurs et, avec l’appui des parents et de l’école, ils sont en mesure de régler les problèmes.

Toutefois, aucun système n’est parfait, et il arrive que des élèves prennent du retard pour toutes sortes de raisons. En pareil cas, l’enfant essaie constamment de combler son retard. Au final, trop d’élèves décrochent ou terminent leurs études secondaires sans avoir acquis les compétences nécessaires en lecture, en écriture et en calcul. Le résultat, souvent, est que ces élèves ne pourront occuper que des emplois à faible revenu plus tard dans la vie et que, à l’échelle locale, le marché du travail sera plus faible et ne sera pas prêt à soutenir la concurrence au sein de l’économie mondiale d’aujourd’hui.

Pour reprendre le document de discussion du Forum national sur la littératie et la pauvreté du collège Frontière :

Selon Statistique Canada, « [i]l existe une relation positive entre le niveau de compétences en littératie et le revenu du ménage ».

Dans une économie fondée sur l’information, les personnes aux prises avec des problèmes de littératie peinent à trouver un emploi ou à gagner plus que le salaire minimum. En retour, de meilleures compétences de base en lecture et en calcul sont associées à de meilleurs emplois et salaires.

Au Canada, jusqu’à 4,3 millions de personnes vivent dans la pauvreté. Malgré les études qui démontrent que l’amélioration du niveau de compétence en littératie peut contribuer à changer cette situation, la littératie ne joue souvent qu’un rôle secondaire dans les stratégies coordonnées pour lutter contre la pauvreté.

Malheureusement, le gouvernement précédent a réduit le financement de base destiné à tous les programmes d’alphabétisation de l’ensemble du pays pour adopter plutôt un modèle de financement à court terme fondé sur les projets. Nous savons qu’il est préférable, pour les familles et, bien entendu, pour les enfants qui en font partie, de financer des programmes de réduction de la pauvreté.

Le gouvernement actuel n’a malheureusement pas changé le modèle qu’avait adopté le gouvernement précédent et qui consiste à financer des projets. Dans une lettre datée de juin, la ministre Hajdu a répondu ceci à la sénatrice Hubley concernant la possibilité de rétablir le financement de base :

Compte tenu de l’ampleur du problème de développement des compétences, nous privilégions une collaboration étroite avec les gouvernements des provinces et des territoires afin de favoriser l’intégration de la littératie et des compétences essentielles dans les programmes d’emploi et de formation professionnelle. Cette collaboration comprend les transferts fédéraux liés au marché du travail, qui atteignent presque 3 milliards de dollars et qui proviennent notamment des ententes sur le développement du marché du travail ainsi que du Fonds canadien pour l’emploi.

La ministre écrit encore ceci :

Les organismes sont encouragés à s’adresser au gouvernement de leur province ou de leur territoire afin d’obtenir du financement provenant des transferts fédéraux pour leurs projets relatifs à la littératie et aux compétences essentielles.

Je voudrais féliciter le gouvernement de l’Île-du-Prince-Édouard d’avoir reconnu l’importance de la littératie sur le marché du travail. Il a annoncé qu’il fournirait un financement de base de 150 000 $ pour les deux prochaines années afin de permettre à la PEI Literacy Alliance de poursuivre ses activités.

Je tiens à remercier les sénatrices Hubley et Griffin de continuer de défendre énergiquement la cause de la littératie à l’Île-du-Prince-Édouard. Je remercie également leur prédécesseure, la sénatrice Callbeck.

Honorables sénateurs, nous savons que le degré de littératie de 48 p. 100 des adultes canadiens est considéré comme inadéquat. C’est inacceptable dans un pays comme le Canada. La sénatrice Hubley l’a souligné dans son discours : c’est dans les provinces de l’Atlantique que le pourcentage de personnes au degré de littératie inadéquat est le plus élevé. Il est de 54 p. 100 au Nouveau-Brunswick, de 56 p. 100 à Terre-Neuve-et-Labrador, de 46 p. 100 à l’Île-du-Prince-Édouard et de 50 p. 100 en Nouvelle-Écosse. Bien entendu, ce sont des moyennes provinciales et, lorsqu’on examine le cas des groupes typiquement défavorisés, on y trouve des pourcentages beaucoup plus élevés.

En Nouvelle­Écosse, 34 p. 100 des enfants d’âge scolaire ont une aptitude à la lecture inadéquate. Même si ce pourcentage est inférieur à celui du Néo­Écossais moyen en âge de travailler, c’est tout de même considérable et inacceptable.

Honorables sénateurs, étant donné que le financement de base des programmes d’alphabétisation a été coupé dans l’ensemble du pays, les organismes d’alphabétisation ont dû s’adapter ou fermer leurs portes, comme cela a été le cas pour Literacy Newfoundland and Labrador, en 2015. C’est malheureux que le financement de l’alphabétisation offert par le gouvernement précédent ait été coupé alors que les taux de faible alphabétisation étaient en hausse. La demande pour des programmes d’alphabétisation croît d’année en année, et les programmes provinciaux et territoriaux ainsi que les organismes d’alphabétisation communautaires à but non lucratif continuent de travailler fort. J’aimerais parler de l’un de ces petits organismes dans ma collectivité : la Dartmouth Learning Network Society.

Établie en 1985 sous la direction du Dr John Savage — qui était maire de Dartmouth et un ardent défenseur de l’alphabétisation —, la Dartmouth Learning Network Society offre aux adultes et à leur famille des possibilités d’améliorer leurs aptitudes en lecture, en écriture et en mathématiques.

L’organisme offre des programmes aux adultes qui souhaitent acquérir de nouvelles aptitudes ou obtenir leur diplôme d’études secondaires pour adultes afin de trouver un bon emploi. Il aide aussi les adultes ayant des difficultés d’apprentissage à perfectionner leurs aptitudes, ainsi que les parents, les soignants, les garderies et les membres de la collectivité qui s’assurent de la réussite des enfants à l’école. La Dartmouth Learning Network Society accomplit tout ce travail avec seulement quatre employés à temps plein et trois à temps partiel. Elle compte beaucoup sur les bénévoles pour la prestation des services. L’organisme estime que la quarantaine de bénévoles formés qui permettent de réaliser cet exploit contribuent à la société en offrant gratuitement chaque année un service d’une valeur de plus de 100 000 $.

L’équipe d’apprentissage communautaire de la Dartmouth Learning Network Society a pour mission d’aider activement les Néo­Écossais qui cherchent à améliorer leurs chances dans la vie, pour eux et leurs enfants, à concrétiser leurs aspirations et à acquérir les compétences en vue d’y arriver.

Honorables sénateurs, la Dartmouth Learning Network Society n’est pas unique en son genre, puisque, tous les jours,d’autres petits organismes d’alphabétisation comme celui-là continuent d’accomplir de l’excellent travail, partout au pays, avec l’aide de centaines de bénévoles.

Honorables sénateurs, puisque le modèle de financement est fondé sur les projets, les petits programmes de ce genre doivent consacrer de précieuses ressources à un processus presque constant de demande de financement. Je crois que, pour améliorer les faibles taux d’alphabétisation, il faudra adopter une politique ciblée et tournée vers l’avenir. L’alphabétisation est l’un des éléments fondamentaux de la vie des Canadiens. Elle aide les Canadiens à se sortir de la pauvreté et à mener une vie plus saine. Lorsque les Canadiens disposent des compétences essentielles pour entrer sur le marché du travail, les retombées en rejaillissent non seulement sur eux-mêmes, mais également sur leur famille et leur collectivité.

Honorables sénateurs, je remercie de nouveau la sénatrice Hubley d’avoir lancé cette interpellation au Sénat et je félicite les sénatrices Callbeck, Fairbairn et Griffin ainsi que le sénateur Demers de l’excellent travail qu’ils ont accompli afin de donner davantage de visibilité au dossier de l’alphabétisation au Canada. J’aimerais enfin remercier les centaines de bénévoles, dans l’ensemble du pays, pour les heures qu’ils consacrent, dans leur milieu, à aider des Canadiens à améliorer leurs compétences en lecture et en écriture.

Des voix : Bravo!